Fratrie : comment résoudre les conflits et favoriser les liens entre frères et soeurs ?

Avoir un petit frère ou une grande sœur est une grande chance pour nos enfants, mais aussi, parfois, source de conflits et de nouvelles contraintes. Comment éviter ou limiter les rivalités et les sentiments de jalousie entre nos enfants ? Comment favoriser la création de ce lien unique, que les frères et sœurs soient très rapprochés ou au contraire d’une grande différence d’âge ? Véronique Maciejak, auteure de « 1, 2, 3 Frères et sœurs – Résoudre les conflits entre enfants, aider chacun à trouver sa place dans la fratrie* », nous guide pour trouver les mots et les gestes qui favoriseront l’harmonie fraternelle.

Comment poser les bases d’une bonne entente entre frères et sœurs ?

Tout commence dans l’anticipation de l’arrivée d’un nouvel enfant dans la famille. Car si c’est un chamboulement pour les parents, c’en est un encore plus grand pour l’aîné. À l’annonce de l’arrivée prochaine d’un petit frère ou d’une petite sœur, certains le prendront plutôt bien, d’autres très mal. Mais pour tous, cela va changer la donne, chaque membre de la famille va devoir trouver une nouvelle place.
Beaucoup d’enfants pensent qu’ils vont devoir partager l’amour de leurs parents. Il faut les rassurer sur le fait que ce n’est pas le cas. Je propose dans mon livre une activité intitulée « la flamme de l’amour ». Elle permet de montrer à l’enfant que l’amour ne se divise pas comme un gâteau (plus on est nombreux moins j’en ai) mais au contraire se multiplie à l’infini.
Si rassurer son enfant est fondamental, j’invite aussi à être honnête avec lui et à toujours lui dire la vérité : oui la vie va changer et oui on aura forcément moins de temps à passer avec lui tout seul.

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Et lorsque le petit frère ou la petite sœur est là ?

Il faut garder à l’esprit que même s’il fait partie d’une fratrie, chaque enfant est unique. Votre aîné a encore besoin de vous avoir pour lui tout seul. Réfléchissez donc à des activités qu’il aimerait faire uniquement avec vous. Il est important de passer régulièrement du temps en tête-à-tête avec chaque enfant. Cela permet de renouer le lien entre le parent et l’enfant, mais aussi, par répercussion, entre les membres de la fratrie : si chacun se sent reconnu dans son individualité, les tensions s’apaisent naturellement.

Comment favoriser la création du lien entre frères et sœurs lorsque la différence d’âge est un peu importante et que les activités communes sont moins nombreuses ?

Quand l’aîné naît, il arrive dans un monde d’adultes. Il va donc naturellement chercher à ressembler à ses parents. Quand le deuxième enfant vient au monde, il aura aussi un enfant pour référence. Son modèle sera le parent, mais aussi le grand frère ou la grande sœur, car c’est lui/elle qui lui ressemblera le plus. Si l’aîné(e) est agacé(e) par ce petit frère ou cette petite sœur qui l’imite sans cesse, c’est une occasion pour nous de le valoriser, de dire à l’aîné que le plus jeune l’admire. Se savoir admiré, en principe, atténue l’agacement. D’une manière générale, la valorisation de chacun des membres de la fratrie permet de diminuer les rivalités.

Quelles activités peut-on proposer à des enfants dont les centres d’intérêts divergent lorsqu’ils ont une grande différence d’âge ?

C’est propre à chaque famille et aux goûts de chacun. On peut penser à chercher des lieux qui plairont à tous, comme un parc ou une aire de jeux. En commençant par s’occuper des plus grands, on pourra ensuite leur proposer de partager un temps avec les plus jeunes. Si les aînés sont satisfaits, en général, ils sont volontaires pour s’amuser avec les plus petits. J’ajoute que si jamais un plus grand a envie de faire une activité qui nous semble un peu bébé pour lui, il ne faut surtout pas l’en empêcher au risque de le blesser dans son estime de lui-même. Gardez à l’esprit qu’en définitive, il n’y a aucune activité pour laquelle on est « trop » grand.
Pour trouver les activités communes, je pense qu’il faut avant tout être dans l’observation, identifier ce qui met en joie vos enfants, les fait rire, et le faire davantage. Quand les enfants jouent ensemble, que tout se passe bien, personnellement, je ne les dérange pas. Même si une sortie est prévue ou que le repas est prêt, je patiente. J’observe discrètement et savoure de voir ce lien entre eux… En revanche, quand je vois que ça ne marche pas, que l’un ou l’autre s’énerve fortement (via des paroles humiliantes ou des frappes), j’interviens immédiatement.

Que faire, que dire, justement, lorsqu’une dispute éclate ?

Tout dépend de la dispute. Si elle reste « saine » (sans paroles dévalorisantes, ni violences physiques), laissez vos enfants faire. Si le ton monte trop fort selon vous, intervenez en observateur pour décrire le problème et incitez vos enfants à trouver une solution entre eux. S’ils n’y arrivent pas, suggérez une ou deux propositions et attendez les leurs. Les enfants sont très créatifs pour peu qu’on les écoute !
Si l’un des enfants vient en disant « tu vois, on se dispute toujours », restez factuel. Lui rappeler qu’avant de se disputer, ils se sont amusés, ils ont eu de super idées ensemble. Il est essentiel de valoriser le positif tout en relativisant le négatif. Dans un groupe, il y a souvent un moment où l’on se dispute et ce n’est pas grave, cela fait partie de la vie à plusieurs. On peut ne pas toujours être d’accord et c’est OK. L’essentiel est de respecter les individualités et de trouver des solutions respectables pour tous.

Demander aux aînés de s’occuper des plus jeunes peut-il être une manière de créer du lien ?

Si l’aîné est d’accord, oui, dans le cas contraire mieux vaut éviter. Un rapprochement forcé a plutôt tendance à distendre les liens. Si cela fait plaisir au plus grand de s’occuper du petit, allez-y les yeux fermés, évidemment ! Réfléchissez ensemble à une activité amusante qu’ils pourraient faire ensemble. L’idée est que votre fratrie se crée un maximum de bons souvenirs ensemble.

*Merci à Véronique Maciejak pour ses précieux conseils. Mère de trois enfants, enseignante de formation, spécialiste de l’accompagnement parental, elle est formatrice, conférencière et auteure. Son dernier ouvrage, 1, 2, 3 Frères et sœurs – Résoudre les conflits entre enfants, aider chacun à trouver sa place dans la fratrie, vient d’être publié aux éditions Eyrolles.

Crédit photo : Belly Balloon Photography/ Les Louves