Confinement : comment expliquer les interdits à nos enfants ?

Plus d’école et plus de crèche, l’absence des copains et des réunions de famille peut soulever quelques questions, y compris de la part de nos tout-petits. Pendant cette période de confinement, comment expliquer les interdits à nos enfants ? Les réponses de Maelys Le Levreur, éducatrice de jeunes enfants, éducatrice Montessori, et directrice de crèche.

Pendant le confinement, comment expliquer les interdits à nos enfants ?

Tout d’abord, cela viendra de votre façon d’expliquer les choses. En effet, le confinement est un acte solidaire. Si vous le vivez comme un emprisonnement, votre enfant le sentira. Nous n’avons pas le choix. Ne pas voir l’autre, c’est le protéger, c’est prendre soin de lui. Pas facile pour un petit de comprendre cela. Pas facile non plus pour les tout-petits de comprendre qu’ils ne peuvent pas aller sur le toboggan du parc ni voir leurs grands-parents… Il faut donc que votre enfant comprenne ce qu’est un interdit. Un interdit est non négociable. Dans la vie de tous les jours, il est interdit de faire mal aux autres ou de se faire mal à soi, on voit donc qu’on peut l’appliquer ici : « Il est interdit d’aller voir grand-père car il y a un virus. Ce virus, nous l’avons peut-être et ce virus peut lui faire du mal et nous ne voulons pas le lui donner » L’interdit doit être accompagné d’une voix ferme et de sourcils froncés pour que votre enfant en comprenne l’importance.

Pourquoi doit-on souvent se répéter ?

Le cerveau de l’enfant est, avant 3 ans, immature. La partie du cerveau qui gère l’impulsivité est grande et, chez lui, l’interdit a une fâcheuse tendance à devenir une attraction. Braver l’interdit, c’est pour l’enfant une manière de s’affirmer et de vous tester : « Papa et maman vont-ils dire la même chose qu’hier ? » Soyez constants dans vos mots et dans vos actes. Si vous laissez passer une fois, votre enfant va devoir reposer la question et donc braver de nouveau l’interdit.

Un tout-petit a donc besoin d’entendre plusieurs fois l’interdit ou la règle pour pouvoir l’intégrer. Il lui faut plus de temps que nous pour comprendre ce qu’on attend de lui. S’il commence à bien parler, vous pouvez lui demander de reformuler l’interdit avec ses mots à lui.

De plus, les neurosciences nous ont démontré que le tout-petit n’entend pas la négation. Par exemple, dans la phrase « Ne mets pas tes mains sur cette porte », il entendra « mains » et « porte » et sera tenté de la toucher. Préférez donc dire « Stop » à son geste que « non ».

Enfin, si votre enfant ne peut maîtriser l’interdit, il peut en revanche maîtriser les gestes barrières et apprendre les moyens de prévention. Il aura ainsi le sentiment de faire quelque chose contre le virus et cela pourra l’aider à réduire son stress.

Peut-on être plus flexible sur d’autres choses durant cette période ?

Bien sûr, c’est même primordial car, si la vie est faite d’interdits qui seront, dans le cas de ce confinement, temporaires, il y a aussi des règles, qui elles, sont négociables en fonction de l’âge de l’enfant, de son développement et de la situation exceptionnelle que nous vivons : « J’ai bien vu que tu avais envie de sauter mais ce n’est pas possible sur la table, en revanche, tu peux le faire sur le lit de Papa et Maman. »

Observez-le et essayez, en une journée, de faire le point sur les gestes qu’il fait, vous verrez alors que votre enfant reproduit souvent les mêmes actions* : pousser, courir, grimper, empiler, explorer, verser, déverser. Pourquoi alors ne pas réfléchir à des jeux qu’il pourrait faire en fonction de cela ? Transformez votre salon en parcours moteur, sécurisez les lieux et faites du canapé un trampoline et des cartons qui traînent des toboggans. Laissez parler votre imagination en prenant le matelas de la chambre d’amis pour en faire une île déserte au milieu du salon ou un coin lecture, prenez les vieux draps pour faire des cabanes… Bref, inventez ! (*Pour en savoir plus sur le sujet, lire l’article sur ” l’affordance et l’enfant” sur le blog My little Coaching.)

Et les règles de la vie quotidienne ?

Un conseil, concentrez-vous sur un petit nombre de règles importantes. Ne vous battez pas sur tout en ce moment. Si on prend le bain un jour sur deux, ce n’est pas grave. Si on prend le dîner sur la table basse non plus.

Les règles doivent être concises et adaptées à l’âge de votre enfant. Concises car plus la règle sera longue, moins il la retiendra et plus il y en aura, moins il les respectera. À vous d’en discuter entre adultes pour faire la même chose.

Pour finir, je vous rassure, ce ne sont pas quelques semaines de sauts sur le canapé ni de pique-niques dans le salon qui auront un impact sur leur développement ou leur savoir-vivre futur. L’impatience et l’irritabilité d’un parent dépassé par les événements pourrait avoir un impact plus négatif sur l’enfant que cela…

Alors d’un côté, on interdit et de l’autre, on se lâche !

Maelys Le Levreur accompagne les jeunes et futurs parents personnellement et lors de conférences ou de permanences parentalité au sein des entreprises. Plus d’infos sur son site My Little Coaching et sur son compte Instagram @mylittlecoaching  

Crédit photo : Belly Balloon Photography / Les Louves