PMA, FIV, fausses couches : « notre histoire ressemble à beaucoup d’autres » 

Des années de PMA, plusieurs ponctions, plusieurs fausses couches… Il aura fallu 6 ans à Stéphanie pour tomber enceinte et devenir maman d’une petite fille. Un parcours semé d’embûches, de doutes et de douleur, dont elle témoigne avec sincérité et émotion.

Notre histoire ressemble à beaucoup d’autres : ce parcours, une grossesse qui n’arrive pas naturellement, des tas d’analyses, des années de PMA, des doutes, des choix à faire et un miracle. Quand j’ai rencontré Florent, nous voulions tous les deux plusieurs enfants. Moi, issue d’une famille recomposée, lui ayant 3 frères et sœurs, nous avions des idées de famille nombreuse plein la tête. On s’est mariés en 2012, nous sommes partis en Tanzanie, je suis tombée enceinte naturellement. J’ai perçu cette grossesse comme un signe, je venais de perdre mon grand-père : une vie pour une vie. J’ai fait une fausse couche 6 semaines après, au travail.

Je commence à douter : et si ça ne marchait pas ?

On repart, une fausse couche, ça arrive. Après 9 mois d’essais, j’insiste auprès de mon gynécologue pour qu’il nous fasse faire des tests. Je sens qu’il se passe quelque chose. Les résultats démontrent en effet des anomalies. On nous redirige vers un médecin spécialisé. Je suis rassurée, on est pris en charge. On enchaine assez vite 4 inséminations artificielles en 2014. Aucune ne donne un résultat positif. On aborde le sujet de la FIV. Et là, je commence à douter : et si ça ne marchait pas ? Je commence à regarder les statistiques. Le taux de réussite n’est pas si élevé, moins de 30 %. On fait la première ponction fin 2014, un transfert qui ne donne rien. On change de protocole. Deuxième ponction début 2015, 6 embryons à J+5. Premier transfert : 15 jours d’attente. Je suis au travail. Je reçois les résultats par Internet : je suis enceinte. Premier RDV échographique à 2 mois, et là en quelques secondes, nos espoirs s’écroulent. Le cœur ne bat pas. Avortement médicamenteux à prévoir. On enchaine le transfert des 5 autres embryons congelés, tous des échecs.

Entre temps, j’ai fait une batterie de tests pour comprendre pourquoi les embryons ne s’accrochaient pas. Pas de résultat probant. Je fais une cœlioscopie, je suis arrêtée pendant 10 jours. On découvre des petites lésions d’endométriose non détectables par IRM.

Je suis enceinte : je n’explose pas de joie, j’ai peur de l’échec

On repart sur une troisième ponction en 2016 : résultat, 6 embryons à J+5. Premier transfert puis deuxième transfert qui échouent. Mon médecin  ne comprend pas non plus. Elle me parle d’analyse génétique de l’embryon, à faire à Londres. En France, notre cas n’autorise pas à le faire. On réfléchit. On se dit qu’on ne le fait pas. On commence à regarder aussi à l’étranger. On pense au don d’ovocyte en Espagne ; la GPA, on ne se sent pas d’affronter le combat juridique.
On fait un transfert de 2 embryons. C’est un succès. Je refais une fausse couche à 6 semaines.
Le 26 juillet 2017, on transfère le dernier embryon. Le jour même, je prends RDV pour entamer les démarches d’adoption.
2 semaines après, j’apprends que je suis enceinte. Je n’explose pas de joie. J’ai peur de l’échec.

À 6 semaines, le cœur bat. À 12 semaines, le temps de la première échographie trimestrielle, on perçoit un visage, des bras, des jambes. On tente même de penser au prénom. On commence à espérer. Et pour la première fois depuis 6 ans, on n’a plus besoin de notre médecin pour espérer une vie à trois. Notre fille est née le 9 avril 2018. Elle est belle, en pleine santé et aimée comme une enfant peut l’être après avoir été autant désirée.

Jusqu’où sommes-nous capables d’aller pour fonder notre propre famille ?

Désirer un enfant a été facile ; le chemin pour y parvenir très long. Pendant ces 6 ans, au-delà des vagues émotionnelles fortes et la peur de ne pas pouvoir être maman, on en vient à se poser des questions que nous n’aurions jamais eues avant : sommes-nous prêts à contourner la loi en faisant appel à des techniques non autorisées en France ? Si nous faisons appel au don d’ovocytes, sommes-nous prêts à accepter que notre enfant ait un patrimoine génétique différent ? Jusqu’où sommes-nous capables d’aller pour fonder notre propre famille ?

La réponse, je ne l’ai pas forcément. Mais je me suis découvert une force combative que je ne soupçonnais pas avoir. Avec beaucoup de tendresse, nos amis nous ont accompagnés ces dernières années. Avec beaucoup d’envie, nous étions les témoins de la naissance de leurs enfants. Il m’est arrivé de ne pas venir à des diners, ne sentant pas la force d’assister à des conversations anodines sur les horaires de la nounou ou les dents qui empêchent de dormir. Alors que moi, je ne rêvais que d’une chose, être réveillée à 2H du matin par des cris de bébé.

J’ai fait de l’étiopathie, de l’acupuncture. J’ai pris soin de moi pendant ces 6 ans. Je me suis rapprochée de femmes qui était complétement extérieures à mon cercle d’amis et famille. J’ai pleuré, beaucoup pleuré. Souvent seule, souvent à l’annonce d’une grossesse. Au fil du temps, j’ai appris à ne plus me retenir d’être triste devant les autres, à expliquer facilement et factuellement où nous étions dans notre parcours. Je ne voulais pas que nos amis se sentent coupables d’avoir des enfants.

Aujourd’hui, nous savourons notre vie à 3. Nous entamons un protocole pour un deuxième enfant. L’enjeu n’est plus le même mais l’envie d’y arriver tout aussi forte.

Crédit photo : Kira auf der heide / Unsplash