Confidences de maman : Suzanne Meyer, danseuse

On l’a vue dans la dernière campagne de pub de Comptoir des Cotonniers, dansant dans les rues de Paris, garçonne et malicieuse. Formée à l’école de l’Opéra de Paris, Suzanne Meyer est danseuse freelance et elle multiplie les projets créatifs. Elle a ainsi lancé à Paris Contakids, des ateliers pour les parents et leurs enfants inspirés de la danse contact, qu’elle aime parfois animer avec sa petite Gisèle, 3 ans. Elle nous parle avec beaucoup de liberté de maternité, d’instinct, de féminité et de son rapport au corps en tant que danseuse et jeune maman…

Peux-tu te présenter et me parler un peu de ton parcours ?

J’aurai 31 ans le mois prochain, je suis maman depuis 3 ans d’une petite Gisèle et je suis danseuse en free-lance depuis plus de 10 ans. J’ai commencé la danse à l’âge de 4 ans et je suis rapidement entrée dans des écoles spécialisées pour en faire un métier. Je suis passée par des écoles académiques, l’Opéra de Paris puis le CNSM de Paris où j’ai étudié la danse classique, la danse contemporaine, les techniques d’improvisation… Puis la vie de danseuse en freelance m’a amenée à rencontrer des gens d’univers très différents et aujourd’hui, au gré des rencontres tout ça est beaucoup plus éclectique. Je suis beaucoup mes envies et mon instinct. J’ai aussi la chance de me voir proposer des projets très variés. Et j’apprécie passer d’un monde à un autre.

Tu animes aussi des ateliers Contakids pour les parents et les enfants à Paris…

Oui, c’est une pédagogie que j’ai découverte en Italie, à Trento, c’est assez répandu là-bas, comme dans d’autres pays (Pays-Bas, Allemagne, Canada). C’est Itay Yatuv qui a inventé en Israël cette pédagogie inspirée de la danse contact, qui s’adresse aux parents et aux enfants entre 2 & 4 ans. Elle m’a tout de suite parlé, émue, intéressée : l’envie est alors venue de faire grandir Contakids dans ma ville, Paris, et de pouvoir partager ces moments de qualité avec d’autres parents et familles. Aujourd’hui mon planning se partage entre ce projet Contakids, mon métier de danseuse, et ma vie de maman bien sûr, qui a tout changé… en plus intense !

Quand as-tu su que tu ferais de la danse ton métier ?

La carrière des danseurs est très courte et on entre dans des écoles assez jeune pour se former. J’avais 9 ans quand j’ai réussi le concours d’entrée à l’Opéra. En revanche, je ne me souviens pas vraiment d’avoir pris la décision franche de devenir danseuse. Je crois que les circonstances, le temps que j’ai passé dans ces écoles et l’investissement que j’y ai mis et (celui de mes parents) ont conduit naturellement à cette finalité.

Quel est ton rapport au corps en tant que danseuse ?

 Le rapport au corps chez les danseur(se)s n’est pas toujours simple. La perspective de se voir en collants tous les jours quand on est adolescent peut créer des troubles… Aujourd’hui par chance, je suis en paix avec moi-même. J’essaye avant tout de composer avec ce que j’ai, ce que la nature m’a donné, comme qualités et comme défauts, et j’essaye d’en tirer le meilleur. Le corps est aussi un outil de travail pour moi donc j’essaye de le respecter et d’en prendre soin.  Mais au-delà de ça, c’est par le corps que les autres nous perçoivent, c’est ce qu’on voit en premier de celui ou celle que l’on rencontre. C’est avec le corps qu’on se déplace dans l’espace, qu’on entre en contact les uns avec les autres, avant même que le langage et la pensée s’en mêle. Aussi il est important pour moi d’être à l’écoute de cela.

La danse a-t-elle également façonné ton rapport à la féminité ?

La féminité fait partie inhérente de mon métier. J’entends ce mot dans les briefs des clients, plusieurs fois par semaine ! Par essence, on demande aux danseuses d’être gracieuses, par exemple en danse classique, elles incarnent souvent des princesses dans les ballets… La danse contemporaine a bouleversé tout cela, heureusement. Lorsque je travaillais au Crazy Horse c’était carrément devenu un domaine de compétence ! Aujourd’hui je convoque la féminité quand c’est nécessaire, quand j’en ai envie, ou quand mon travail me l’exige. Je crois aussi qu’à 30 ans, je suis assez en paix avec moi-même pour ne pas avoir à user d’artifices à outrance ! Dans ce monde qu’il m’arrive parfois de trouver vulgaire, j’essaye de mesurer ma féminité à quelque chose de sensible et de délicat et de la réserver à des moments que je choisis. C’en est d’autant plus fort.

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Est-ce que la grossesse et la maternité ont changé ce rapport ?

Oh oui ! La maternité permet de poser un nouveau regard sur les choses qui nous entourent, et avant tout, sur soi, évidemment. Ce corps (celui de toutes les mamans), qui a changé, qui a été distordu, qui a porté, qui nous a accompagné, qui a été fort et fragile, parfois en même temps, qui garde des traces, ce corps qui exprime un avant et un après… Il m’a fallu plusieurs mois pour accepter cela. En ça je dois dire que le soutien de mon compagnon a été l’aide la plus précieuse qui soit. Désormais, j’assume tout. Dans un métier où l’image compte beaucoup, où le paraître compte parfois plus que l’être, tous ces regards n’ont pas été faciles à soutenir (peut-être même que ces regards n’existaient que dans ma tête) ! Mais sincèrement et même si ça a pris du temps pour ne plus en souffrir, aujourd’hui, je me sens loin de ce que les autres pourraient penser de moi et de mon corps. Comme je le disais précédemment, je suis en paix, et ça fait du bien.

Quel a été l’impact de ta grossesse sur ta carrière ?

Comme beaucoup d’autres femmes, ma carrière a beaucoup ralenti. D’autant que les danseuses doivent s’arrêter rapidement. Difficile de se faire engager avec un ventre grandissant, ou même de danser ! Mais ça je l’avais anticipé et je me rappelle de cette période d’ailleurs, comme très heureuse. Je me suis occupée autrement, je me suis réalisée en passant par d’autres chemins, tout allait bien. En revanche, une fois accouché, ma forme physique et ma ligne récupérées, j’étais prête à retravailler et à ce moment-là, il y a eu des mois déserts sans réelle opportunité. C’était la première fois que ça m’arrivait et j’ai été assez déstabilisée. J’ai même fait un bilan de compétences et cherché un nouveau métier.

Puis comme j’aime à croire que rien arrive par hasard… Contakids est arrivé. La découverte de cette pédagogie a été une expérience très forte pour moi, l’alignement des planètes s’est produit. Je suis rentrée chez moi, remplie, sereine et heureuse. Après des mois d’inquiétude et de questionnements, ça m’a fait du bien. Et alors que je pensais devoir faire une reconversion, tout a redémarré… et encore plus fort qu’avant ! Je ne sais pas vraiment ce qui s’est passé. La naissance d’un enfant bouleverse beaucoup de choses, sur le plan personnel, et aussi énergétique. Mais avec le recul, je me dis que c’était nécessaire. Grâce à tout cela je suis sortie de ma zone de confort. Et si je devais vivre l’arrivée d’un deuxième enfant, je ne sais pas de quoi sera fait le futur… mais il y a des déclencheurs, qu’il faut suivre…

Est-ce que ta parfaite maitrise de ton corps t’a aidée pour l’accouchement ?


J’ai longtemps pensé que la connaissance de mon corps pourrait m’aider. Mais finalement c’est hyper prétentieux ! Plus sérieusement, il y a tellement de facteurs qui entrent en jeu au moment de l’accouchement que je ne suis pas sûre d’avoir « mieux su » accoucher que si je n’étais pas sportive.

As-tu su lâcher prise ?

Oui j’ai lâché prise quand mon docteur est arrivé ! J’avais une grande confiance en lui, c’est quelqu’un d’exceptionnel. Et puis c’était aussi le moment de la poussée, et pour une raison qui m’échappe un peu, à ce moment-là, je n’ai jamais été aussi sûre de moi.

Avais-tu appréhendé ton accouchement comme on se prépare à une performance ?


Quelque part c’est une performance ! On doit s’y préparer… D’ailleurs tout le monde le fait. Pour ma part, mon ostéopathe m’avait suivie tout au long de ma grossesse et je lui dois un super accouchement rapide, je crois… Mais il n’y a pas de « bonne » préparation. Tout le monde dit qu’il faut rester ouvert à toute éventualité, et c’est un bon conseil il me semble.

Comment t’es-tu préparée à l’accouchement ?

Haptonomie et ostéopathie. Pour le deuxième, j’essaierai volontiers l’hypnonaissance.

Quelle maman es-tu ? T’es-tu découverte instinctive ou plutôt stressée ?

Je ne sais pas répondre à cette question ! Je crois que je suis à la fois stressée et instinctive, c’est possible ? Je vais plutôt vous dire ce que j’essaye de faire… J’ai envie d’être une maman très présente. Tant que mon enfant aura besoin de moi, je serai là. Je lui donne toute ma présence, entièrement et pleinement. Bizarrement, je culpabilise rarement… J’accepte de ne pas être wonderwoman. Je sais que je ne suis pas une maman parfaite et je n’essaye pas de l’être. J’ai beaucoup d’amour à donner, c’est le rôle de ma vie, vraiment. J’adore lire les articles sur les conseils éducatifs, mais à la maison, je fais comme je peux, c’est-à-dire parfois, pas comme dans les articles !

Quel est ton rapport à ta fille et à la danse : as-tu envie de lui transmettre ta passion ?

Je n’ai pas du tout envie de transmettre ma passion à ma fille ! Elle aura ses propres passions, et si c’est la même que moi ça m’inquiètera sûrement un peu ! Je danse avec elle parce que c’est naturel pour moi. Mais je le fais sur un registre hédoniste. C’est du pur plaisir, il n’y a aucun autre objectif que celui de s’amuser, aucune perspective de performance, ni de passage de relais. On le fait, comme on s’amuse à écouter de la musique, ou à dessiner, au milieu d’un tas d’autres choses. Remarquez que tous les enfants aiment danser, même ceux dont les parents ne sont pas à l’aise avec le mouvement. C’est en fait quelque chose d’assez naturel.

Comment as-tu choisi le prénom de ta fille ?

Gisèle, c’est une référence d’enfance pour moi. Je me suis longtemps prise pour Sissi (rires), grâce à la beauté de Romy Schneider et à mon goût pour les robes du XIXème. J’ai donc nommé ma fille en hommage à celle de l’impératrice d’Autriche. Je n’ai pas présenté la chose comme ça à son papa… du moins au début. Mais c’est la vraie raison de ce choix !

Retrouvez plus d’informations sur les ateliers Contakids sur www.contakidsparis.com et sur le compte Instagram @contakids_paris. Retrouvez Suzanne Meyer sur son compte Instagram.