Matrescence, ou comment bien vivre votre adolescence de la maternité…

Pour la jeune maman, les premières semaines et les premiers mois avec son bébé sont remplies d’interrogations, de doutes et de nouvelles obligations à intégrer dans son quotidien. La « Matrescence » est une période de transition et d’adaptation à ce nouveau rôle. Magique pour certaines, elle peut s’avérer extrêmement perturbante pour d’autres… Comment accueillir sereinement son nouveau-né et créer le lien avec lui ? Où puiser l’énergie nécessaire pour faire face au manque de sommeil ? Comment bien vivre la reprise du travail après le congé maternité ? Avec la complicité de Stokke, on a abordé ce 4e trimestre de la maternité lors d’un Small Talk inédit avec des expertes de la périnatalité. En voici quelques extraits avec les conseils de Camille Marc, infirmière et sophrologue, consultante bien-être en entreprise et en accompagnement de la parentalité. 

Infirmière et sophrologue de formation, vous accompagnez les parents, après la naissance de leurs enfants, en crèche ou en entreprise. Quels sont les sujets que vous abordez avec eux ? 

Pour les parents, en crèche comme en entreprise, l’enfant est source de nombreuses inquiétudes et appréhensions. Ils ont besoin d’être rassurés et accompagnés sur la santé, les soins et l’évolution de leur enfant mais aussi à des moments précis, comme par exemple au moment de l’allaitement et du sevrage, pendant la phase d’adaptation en crèche, au moment de l’introduction alimentaire, avant l’entrée à l’école. De moins en moins de pédiatres prennent le temps d’accompagner la parentalité et ses questions ; c’est pourquoi nous mettons en place en crèche des consultations autour de l’allaitement et du sevrage, du sommeil des enfants et des parents, de l’introduction alimentaire. Nous proposons aussi des cafés parents pour échanger sur les grands thèmes de la parentalité : sommeil, alimentation, apprentissage et éducation, vie de couple, temps d’écrans… 

Il y a 10 ans les actions en lien avec la parentalité étaient inexistantes en entreprise, désormais ces dernières s’investissent : elles ont saisi les liens entre efficacité au travail et gestion de la parentalité et proposent des accompagnements autour de l’équilibre des temps de vie, de la charge mentale et de la gestion de la fatigue. 

On parle du « 4e trimestre de la maternité », pour désigner la période de l’après-grossesse et ce moment où l’on devient maman, des premiers mois où une jeune mère est particulièrement vulnérable et plutôt moins entourée que pendant la grossesse… Comment l’abordez-vous dans vos consultations ?

Ce thème est peu abordé par les jeunes mamans même lors des premiers rendez-vous en crèche et encore plus en entreprise : peu de femmes osent parler des difficultés d’adaptation à ce nouveau rôle, des émotions en montagnes russes, de la reprise d’une vie de couple … C’est encore actuellement très mal vu de dire que c’est difficile. En France la maternité est idéalisée et doit forcement renvoyer une image positive : si cela est différent, cela entraîne de la culpabilité.

La Matrescence est une période de transition et d’adaptation à ce nouveau rôle. Magique pour certaines, elle peut s’avérer extrêmement perturbante pour d’autres :

  • Le corps après l’accouchement est source de nombreuses questions et d’angoisses (changements physiques et gynécologiques, silhouette différente, douleurs, fatigue, jambes lourdes, perte des cheveux, reprise des règles, contraception)
  • Les femmes sont soumises à un bouleversement hormonal et émotionnel qui peut les surprendre (sensibilité exacerbée, inquiétudes incontrôlées, hyperactivité, phases d’exaltation, sautes d’humeurs, perte de confiance en soi).
  • Chaque femme et chaque mère éprouve des émotions, des envies, des sensations différentes : certaines recherchent une symbiose avec leur bébé, d’autres ne ressentent pas cette nécessité – nul besoin de culpabiliser, l’important est de s’écouter.

Quel rôle jouent les hormones durant cette période ?

Grâce à l’ocytocine, une hormone produite à la naissance et pendant le peau à peau « le cerveau de la mère zoome ». Cette hormone recentre l’attention autour du bébé pour qu’il soit désormais le centre de sa vie quotidienne. Via l’ocytocine l’emploi du temps des mères, leur énergie et leurs pensées sont attribuées au bébé. Cet instinct naturel permet de maintenir le bébé en zone de sécurité, lui qui est totalement dépendant et incapable de survivre sans l’attention et les soins prodigués par sa mère. En même temps beaucoup de mères rejettent ce mécanisme car elles attribuent leur identité à d’autres composantes : les relations, la vie de couple, le travail, la vie spirituelle ou intellectuelle sans parler des besoins physiques : dormir, manger, prendre soin de soi, faire du sport … Il y a ambivalence, « tiraillement entre attraction et rejet » Certaines femmes éprouvent des difficultés à s’adapter à ce nouveau rôle ou à créer du lien avec leur enfant. Pour certaines c’est une absence de sérénité, le sentiment qu’elles ne vont pas y arriver ou qu’elles ne sont pas épanouies à 100%, certaines vivent mal l’allaitement, d’autres évoquent la charge mentale des nouvelles mamans. Cette phase de bouleversement est normale.

L’équilibre hormonal met aussi quelques mois (de 3 à 6 mois) à se stabiliser et peut provoquer une phase de bouleversement émotionnel : sensibilité exacerbée, inquiétudes incontrôlées, hyperactivité, hyperémotivité, phases d’exaltation, sautes d’humeurs, perte de confiance en soi.

Comment distinguer baby blues, dépression du post-partum et bouleversement hormonal ? 

Le Baby blues est un épisode normal, sans gravité qui touche 80% des jeunes mamans. Il est appelé le syndrome du 3e jour et se caractérise par un orage hormonal, émotionnel et existentiel qui fait passer du rire aux larmes en quelques minutes, de la joie au désespoir, d’un état d’angoisse à une forte irritabilité… Il est dû à l’augmentation du stress et de la fatigue, accompagné d’une chute hormonale importante. Le baby blues ne dure que quelques jours. Il disparaît sans intervention et ne nécessite pas de traitement. 

Cet épisode de courte durée est totalement différent d’une dépression du post-partum : plus longue et plus grave, celle-ci touche 10% des femmes après l’accouchement, souvent 4 à 9 semaines après l’accouchement mais aussi jusqu’à 1 an après. Elle se caractérise par un désintérêt global, une perte d’énergie importante, des troubles du sommeil, une hyperactivité associée à de l’anxiété, de la fatigue et des troubles de l’interaction avec l’enfant. Les femmes se sentent submergées, incapables de s’occuper de leur enfant. Des soins pour la mère sont parfois nécessaires (suivi psychologique, traitement antidépressif et anxiolytique).

La Matrescence, quant à elle, se caractérisepar une phase de bouleversement et de nombreux changements physiques et hormonaux, émotionnels et psychiques. C’est une phase normale de transition, d’adaptation qui peut susciter des interrogations.

Que peut apporter la sophrologie dans cette période ? 

La Sophrologie, par les outils qu’elle propose, va aider à traverser plus sereinement cette phase de bouleversement. La meilleure compréhension de certains phénomènes et l’apprentissage de techniques très simples permettent de se détendre et d’évacuer les tensions, de mieux récupérer, d’augmenter la résistance au stress, la capacité à gérer les émotions et à prendre du recul vis-à-vis des difficultés. Elle permet aussi de s’épanouir et de se ressourcer avec son enfant dans l’instant présent.

Quels outils proposez-vous à ces toutes jeunes mamans qui sont dans la découverte de leur nouveau rôle et qui doivent jongler entre ce grand bouleversement de vie, la fatigue et le déferlement d’hormones qui les accompagne ? 

Certains outils peuvent permettre de traverser plus sereinement cette période :

  • Les techniques de récupération et d’amélioration de la qualité de sommeil, par exemple l’apprentissage de la Power Nap ou Micro-Sieste qui est une des meilleures techniques de récupération pour lutter contre la fatigue.
  • Les techniques de respiration, de relaxation et de relâchement musculaire pour préserver sa santé, sa vitalité et réduire son stress.
  • La pratique de la Méditation de pleine conscience « Mindfulness » qui est très efficace pour la régulation du sommeil, des émotions et de la charge mentale.

Le 4e trimestre est parfois un peu trop court pour avoir le temps de devenir maman… Lorsqu’approche la fin du congé maternité, comment éviter le stress et l’anxiété liés à la reprise du travail ? 

Pour éviter le stress et l’anxiété liés à la reprise du travail, il est essentiel d’anticiper et de bien préparer sa reprise en amont pour être parfaitement sereine le jour J : 

  • S’habituer à laisser quelqu’un d’autre s’occuper de son enfant, en faisant par exemple intervenir une personne de confiance pour le garder une ou deux heures. 
  • Préparer la transition dans le mode de garde : être au clair et en confiance.
  • En cas d’allaitement, anticiper son sevrage ou l’organisation liée à l’allaitement mixte ou complet.
  • Réfléchir en couple à la nouvelle organisation familiale pour se faciliter le quotidien et éviter les tensions.

Que conseillez-vous à ces jeunes mamans qui doivent gérer leur job et un nourrisson à la maison et peut-être ses frères et sœurs qui réclament 100% d’attention, de temps et d’énergie ?

Les jeunes mamans portent une grosse pression, beaucoup plus que les générations précédentes car nous vivons dans une société de performance : il faut être une bonne mère, assurer au boulot, maintenir une vie de couple épanouie, faire du sport et maintenir une silhouette de rêve. Les neurosciences mettent aussi plus de pression dans la manière de s’occuper des enfants. Je leur conseille avant tout de lever le pied et ne pas vouloir être sur tous les fronts, de relâcher cette pression et de se concentrer sur l’essentiel : 

  • Prioriser : Qu’est-ce qui est le plus important pour moi ? 
  • Déléguer : à son conjoint, aux autres enfants et accepter les propositions d’aide de votre entourage.
  • Accepter que certaines choses ne soient pas faites comme on l’aurait voulu et réduire ses attentes concernant les tâches domestiques, la cuisine, les courses et l’éducation des enfants.
  • Prendre du temps pour soi pour évacuer la pression : lire un livre, prendre un bain, faire une sieste, du sport …
  • Puiser l’énergie et le plaisir là où il est, dans leur bébé par exemple… C’est à force de l’observer et de le câliner que l’on comprend mieux ses besoins et que l’on crée le lien avec lui. Cela contribue à renforcer notre confiance en nous et en nos capacités à être mères.
  • Ne pas se comparer aux autres et ne pas se laisser influencer, culpabiliser par la pression sociale, suivre son instinct et se faire confiance.

*Plus d’infos sur Camille Marc et sur son accompagnement en entreprise sur bien au bureau.

Réalisation : Les Louves X Stokke 
Crédit photo : Belly Balloon Photography/ Les Louves