Mumpreneur : comment s’organiser sans congé maternité ?

Que l’on soit freelance, chef d’entreprise ou à la tête d’une jeune start-up, l’arrivée d’un bébé est assurément synonyme d’un tsunami dans le quotidien. Dans cette période où la fatigue prend le pas et où l’on se sent vulnérable, difficile de continuer à assurer quand le congé maternité n’est qu’un mot sur le papier. Comment s’organiser les premiers mois ? Comment concilier ses journées entre un bébé et des clients à contenter, sans culpabiliser ? Des mumpreneurs nous livrent leurs précieux témoignages, avec les astuces qui leur ont permis de mener de front vie de toute jeune maman et carrière d’entrepreneur…


Congé maternité pour les mumpreneurs : que dit la loi ?
L’assurance maladie est claire : lorsque vous attendez un bébé, vous avez droit à un congé maternité de minimum 16 semaines ( 6 semaines de congé prénatal, 10 semaines de congé postnatal). Une règle qui pourtant ne s’applique pas à toutes les jeunes mamans : vous avez monté votre propre structure ou travaillez à votre compte en freelance ? Alors attendez-vous à un parcours moins reposant pendant les dernières semaines de votre grossesse et les premiers mois qui suivront votre accouchement… Les jeunes mamans qui ont choisi un statut d’indépendant ont droit à des indemnités maternité, via deux dispositifs de compensation : l’allocation forfaitaire de repos maternité et les indemnités journalières. Depuis mai 2015, les auto-entrepreneurs affiliées au RSI touchent une allocation de repos maternité qui s’élève à 1585 euros pour une naissance. Pour les indemnités journalières, les plus petits auto-entrepreneurs ont droit à environ 1146 euros pour 44 jours d’arrêt, 1536 euros pour 59 jours et 1927 euros pour 74 jours. On reste loin du congé qui assure aux jeunes mamans le maintien de leur salaire… Face à ces conditions particulières et souvent dans l’impossibilité de laisser leur vie professionnelle entre parenthèses plus de quelques semaines, les « mumpreneurs » s’organisent et apprennent à concilier tant bien que mal leur quotidien de nouvelle maman et leur job à plein temps.

Éduquer ses clients
Marion, 28 ans, maman des jumeaux Paul et Jules qui ont aujourd’hui 3 ans, raconte : « En 2013, j’ai appris que j’étais enceinte de jumeaux, alors que j’étais en train de créer ma société d’évènementiel ». Elle s’organise et après la naissance tient à ce que ses clients connaissent sa situation. « J’ai du “éduquer mes clients” sur le fait que mes enfants étaient au bureau après une certaine heure. Aujourd’hui mes fils jouent dans l’espace que je leur ai organisé au bureau, ils savent que je travaille mais lorsqu’ils ont besoin d’attention ils viennent demander un câlin. Cela fait beaucoup rire mes collègues, fournisseurs et clients. Comme me l’a dit un jour une cliente : ” ils font partie de l’équipe ” ». Idem pour Agathe, maman d’un petit garçon : « freelance et sans mode de garde jusqu’à ce que mon fils ait un 1 et demi, il me suivait à tous mes rendez-vous clients, devenant une vraie mascotte ! ». « Ma fille faisait régulièrement des rendez-vous avec moi, j’emportais partout mon maxi-cosy et nous étions un peu comme des stars toutes les deux », raconte Juliette, 37 ans, maman de deux filles. Même stratégie de transparence pour Selena, une autre jeune mumpreneur : « c’est la première règle que je me suis fixée : ne pas cacher à mes clients que j’étais enceinte et en congé maternité et assumer jusqu’au bout la volonté de combiner vie professionnelle et vie de maman active. Il m’est arrivé de décliner des missions en recommandant d’autres free-lance de confiance pendant les périodes compliquées et cela ne s’est jamais retourné contre moi, bien au contraire. »

Se faire aider
Le secret des jeunes mamans pour gérer le quotidien ? Ne pas hésiter à demander de l’aide. Et en premier lieu au papa… « Nous avons instauré le “saturdaday” soit la journée père-fils avec seulement le déjeuner en commun tous les trois, pour que je puisse travailler tranquillement le week-end », raconte Maud, maman d’Octave 5 mois et demi. « Mon mari a posé une journée de congé par semaine depuis la naissance de notre fils et a profité du congé paternité pour partir en tête à tête avec son fils quelques jours chez les grands-parents. J’ai eu le droit à des journées très productives ! », confie quant à elle Charlotte, maman d’un petit garçon de 3 mois.
Selena a découvert une astuce « fabuleuse » pour se faire aider dans son quotidien : « ne bénéficiant pas d’un long congé maternité avec le RSI, je n’ai pas hésité à me faire aider par une TISF (Techniciens de l’Intervention Sociale et Familiale) via la CAF (grâce à l’association Famille et Cité). Cette aide consiste à dépanner les femmes enceintes et mamans de bébés de moins de 6 mois à domicile pour s’occuper des grands, faire les courses, le ménage, vous permettre d’aller aux séances de kinésithérapie post-partum, à des rendez-vous professionnels… Bref, un vrai coup de pouce qui s’avère bienvenu avec un nourrisson à la maison et une activité à maintenir ! ».

Aménager un espace au bébé et organiser ses journées
« J’ai toujours travaillé avec mes enfants dans les jambes », s’amuse Anouchka. « Pour les aînés, qui sont très rapprochés en âge, j’avais installé une table avec de petites chaises dans mon atelier pour les laisser faire leurs activités près de moi et en même temps que moi. Pour ma dernière âgée de 19 mois aujourd’hui, je l’ai toujours trimbalée partout ». Toutes les mamans le disent : les premières semaines, le bébé a trouvé sa place au bureau, que celui-ci soit dans le salon ou à l’extérieur. « J’avais investi l’immense table basse du salon pour en faire mon espace de travail. La petite, qui heureusement était une grande dormeuse, avait son espace à côté de moi : transat d’abord, puis tapis d’éveil. Tout était à ma portée : biberons, tétine, couches… », explique Juliette, maman de deux fillettes. Côté agenda, les siestes sont des moments précieux… pour le travail. « Ma solution ? Être à 2000% pendant les siestes ! », s’amuse Laure. « Octave dort beaucoup l’après-midi et là c’est concentration maximale, je suis tellement contente de pouvoir bosser quelques heures que je suis super efficace ! Idem le soir j’en profite dès qu’il dort pour assurer mes commandes », raconte Maud. « Si j’avais un conseil : profiter aussi des siestes de son bébé pour faire des breaks de temps en temps, ça prend quand même beaucoup d’énergie de concilier vie de maman et vie d’entrepreneuse! », souligne Agathe.

Faire des choix au travail
« Je ne suis pas encore en congé maternité,  mais j’ai planifié le combo « arrivée du bébé/gestion de ma jeune entreprise » en identifiant en amont les deux-trois priorités business sur lesquelles je vais focaliser mes efforts », explique Capucine, déjà maman d’un premier enfant. « J’essaie de voir ce « chômage technique » comme une opportunité. Je n’aurais pas le temps d’être dans l’opérationnel donc je profiterai de nos ballades inspirantes au parc pour faire le point un an après le lancement du projet et mettre en place la road map de la phase deux… ». Faire des choix, c’est aussi le conseil de Charlotte. cette créatrice de robes semi-mesure et auteure de livres de coutures a choisi de ne pas surcharger sa to do les premiers mois. « J’ai choisi de continuer mes activités d’auteur pendant cette période et j’ai fermé ma boutique en ligne, ne pouvant pas gérer les deux en même temps et ne souhaitant pas décevoir mes clientes avec des délais trop longs », confie-t-elle. « Je pense également qu’il ne faut pas être trop ambitieuse sur des to-do listes qui ne seront jamais terminées en temps et en heure, sinon gare à la frustration ».

Le nerf de la guerre : le manque de sommeil
Au fil des témoignages, beaucoup oublient d’évoquer leur fatigue, celle des premières semaines, quand le corps accuse le coup d’un accouchement, que le bébé ne fait pas encore ses nuits et que la fébrilité est palpable. « Pour être tout à fait franche, le manque de sommeil a été très dur », confie Juliette. « Au début je ne dormais pas pendant les siestes de mon fils mais j’ai pris vite le pli pour récupérer un peu de tonus. J’ai eu un post-accouchement difficile, avec rétention placentaire et un système immunitaire très faible. Résultat : j’étais malade tous les quinze jours et fatiguée. Ca a duré cinq mois ». Flore, maman de deux enfants, insiste : « il faut essayer d’avoir une super hygiène de vie ( sommeil et nourriture) pour réussir à combiner travail et nuits blanches ». Avec humour, une autre Juliette, qui a créé son agence de communication et qui a un bébé de 2 mois et demi résume : « je suis épuisée : ma vie ressemble à une énorme cuite sans fêtes ! ».

Pauline Sauter, 28 ans, est infirmière depuis 6 ans et puéricultrice. Elle accompagne les jeunes parents lors du retour à domicile et assure de plus en plus le relais de nuit pour des mamans au bord de l’épuisement. « En général, j’arrive à 22h et reste jusqu’à 7h ou 8h, pour prendre soin du bébé pendant que les parents reprennent un peu d’énergie », explique-t-elle. Une nuit par semaine ou plusieurs nuits d’affilé, elle permet à des jeunes mumpreneurs de se reposer et de faire une pause face au rythme trop soutenu bébé-boulot. « J’accompagne beaucoup de mamans qui sont à leur compte, qui ne s’étaient pas préparées à une telle fatigue et qui ont besoin de souffler. On me demande aussi souvent de rester la journée, quelques heures souvent pour m’occuper du bébé pendant un rendez-vous important ou quand la maman doit se concentrer ». « Je suis un peu l’ombre de la maman, je m’occupe du petit et je la rassure », conclue Pauline.

M.R.

Plus d’informations sur les droits des femmes enceintes et jeunes mamans sur ces sites :
www.federation-auto-entrepreneur.fr
www.rsi.fr
www.auto-entrepreneur.fr
www.previssima.fr
www.artisans.chefdentreprise.com

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