Vos confidences : FIV, prête à recommencer ?

Lorsqu’après plusieurs mois voire plusieurs années d’essais une grossesse n’arrive pas, un autre parcours commence qui demande autant de patience que de détermination. FIV, insémination artificielle et autres procédés de procréation médicalement assistée représentent une aventure nouvelle à laquelle aucune femme n’est vraiment préparée. Certaines d’entre vous ont accepté de nous raconter l’histoire aussi douloureuse que merveilleuse de la conception de leur premier enfant, et de nous dire si elles seraient prêtes à recommencer pour agrandir encore la famille. Merci pour vos témoignages drôles, touchants et encourageants.

 

Mathilde, 31 ans: « L’épreuve de la PMA a vraiment renforcé notre couple »
J’ai été diagnostiquée d’une endométriose de stade 4 avec infertilité sévère à l’âge de 26 ans. Comme ça, par hasard, après des années de douleurs menstruelles. À cette époque, mon compagnon et moi commencions tout juste à parler d’avoir un enfant ensemble. Curieusement, l’annonce de celle maladie m’a d’abord soulagée. J’ai toujours su que quelque chose n’allait pas à l’intérieur de moi, et mettre un nom dessus m’a rassurée. Je n’étais pas douillette et hypocondriaque, non. J’étais malade.
En revanche, lorsque j’ai reçu un matin, par courrier, l’annonce que je ne pourrais peut-être jamais porter d’enfant, j’ai été anéantie. Car s’il y a bien une chose dont j’ai toujours été sûre, c’est que je voulais être mère. Les premiers jours après l’annonce, je ne pouvais pas m’empêcher de me dire que je ne le serais jamais. Mon compagnon, lui, était beaucoup plus optimiste. Était-ce pour contrebalancer mon inquiétude? Je ne sais pas, mais il était sûr que nous y arriverions d’une manière ou d’une autre. Je crois que c’est cette certitude et son soutien à toute épreuve qui m’ont permis de supporter les différentes opérations, les traitements et toute la cohorte d’analyses qui vont avec la FIV, avec une relative douceur. Au fond, j’étais persuadée que la première tentative de FIV ne marcherait pas. Aussi, nous avons décidé de la prendre un peu à la légère, comme un entraînement.
Et, contre toute attente (la mienne et celle des médecins), nous avons eu une très belle récolte d’embryons et je suis tombée enceinte dès la première tentative de FIV. Notre fille est née en février 2014. Cette période, nous l’avons vraiment vécue à deux. Mon compagnon venait à presque tous mes rendez-vous et je venais aux siens. C’est lui qui me faisait mes piqûres et il était d’une douceur infinie. Nous avons aussi beaucoup parlé du processus de la FIV. Je sais que, pour lui, ce n’était pas facile de parler hormones, règles et utérus, et qu’il aurait préféré que ces choses demeurent un mystère… Mais pour nous la FIV n’a jamais été un tabou et nous avons beaucoup parlé et plaisanté de notre situation avec nos amis et nos familles.

Une deuxième expérience plus compliquée
Je crois qu’au final l’épreuve de la PMA a vraiment renforcé notre couple et cela nous a permis de tenir le coup après la naissance et ses nombreuses nuits sans sommeil… Finalement, le souvenir des désagréments de la FIV s’efface vite et on se retrouve, sans s’en rendre compte, à envisager un autre enfant. Je crois que c’est moi qui en ai parlé la première… Je venais d’avoir un contrôle gynéco qui m’annonçait que l’endométriose était revenue en force et qu’il serait sûrement plus difficile encore de concevoir un enfant. Je venais d’avoir 30 ans. C’était maintenant ou jamais. Au départ on n’a pas trop réfléchi. On pensait (bêtement) que ce serait plus simple la seconde fois, puisque nous avions encore sept embryons cryo-conservés (congelés). Nous avons donc pris rendez-vous dans notre nouveau centre de PMA, puisque nous avions déménagés à l’autre bout de la France. Et c’est là que tout s’est compliqué. D’abord, il a fallu rapatrier nos embryons (restés à plus de 1000km de nous) par nos propres moyens. Un vrai casse-tête dans lequel il fallait désormais inclure notre petite fille d’un an. Ensuite il a fallu me réopérer, ma maladie ayant une nouvelle fois pris ses aises. Puis, ce sont les traitements hormonaux qui ne convenaient pas. On a laissé passer l’été avant de s’y remettre. De temps en temps, il faut s’accorder des respirations… Question de survie. J’aurais pu me douter que ce ne serait pas une sinécure. Se serait-on relancé dans l’aventure si nous avions su? Probablement oui. D’ailleurs nous avons bien fait de persévérer car la deuxième tentative de transfert d’embryon congelé (TEC) a été un succès et j’ai l’immense bonheur de porter, de nouveau, une petite fille qui viendra agrandir notre famille en juin.

Si vous deviez recommencer?
Malheureusement cette nouvelle grossesse s’accompagne de nombreuses douleurs liées à ma maladie, ce sera donc la dernière. Nous sommes conscients de la chance que nous avons eu de pouvoir vivre deux fois le bonheur de porter la vie. Et puis deux enfants ce n’est déjà pas si mal pour quelqu’un de « sévèrement infertile »…

Quels conseils donneriez-vous à une maman dans cette situation?
Je lui dirais de se faire confiance, de se faire du bien et de toujours garder espoir car la médecine fait des miracles, bien plus que ce que l’on peut lire sur Internet. C’est d’ailleurs une des raisons qui m’ont poussée à ouvrir mon blog il y a un an. J’y consacre un rendez-vous trimestriel pour interviewer des femmes qui ont vaincu l’infertilité.

 

‌Valérie, 44 ans: « Une fois lancée dans le processus, j’ai repris confiance en moi et j’y ai cru »
Lorsque nous avons décidé mon compagnon et moi d’avoir des enfants, j’avais presque 36 ans et au bout de plusieurs mois d’essais vains, j’ai pris les devants. J’ai passé toute une batterie d’examens, lesquels démontraient une faiblesse ovarienne modérée et la présence d’un kyste organique qu’il a fallu opérer. J’ai alors décidé de consulter plusieurs médecins, dont un célèbre spécialiste pour savoir quel protocole adopter. Les avis étaient divergents mais la plupart étaient d’accord sur un point: à 37 ans, et au vu de mes résultats, il fallait entamer prendre le chemin de la PMA, c’est-à-dire commencer par une stimulation ovarienne, puis des inséminations, puis des FIV. J’ai eu beaucoup de peine et ressenti un grand sentiment d’injustice… J’ai vraiment cru que cela n’allait jamais marcher, mais une fois lancée dans le processus des inséminations, j’ai repris confiance en moi et j’y ai cru. Mon compagnon m’a beaucoup soutenue. Il a été beaucoup plus confiant que moi dans l’enchaînement des rendez-vous médicaux. Il dédramatisait la situation, et à chaque rendez-vous d’insémination nous étions très détendus, voire même un peu insouciants… Nous avons même failli louper la cinquième insémination qui a donné naissance à notre fille ! Peut-être était-ce une façon de nous protéger. À partir du moment où les inséminations ont démarré, je suis tombée enceinte au bout de six mois.

L’incroyable surprise du deuxième…
Mon parcours a de ce fait été relativement court en terme de traitement mais long au regard de l’opération que j’ai subie et des avis que j’ai collectés avant d’être sûre de m’engager dans cette voie.  Après la naissance de notre fille, mon compagnon me demandait souvent si je souhaitais avoir un deuxième enfant. Je ne le souhaitais pas spécialement. D’où mon étonnement lorsque j’ai appris, cinq mois après avoir accouché, que j’étais enceinte de deux mois ! Une contraception m’avait été proposée à la clinique mais avec mon parcours, je l’avais refusée. Ma seconde fille est née 11 mois et demi plus tard…

Si vous deviez recommencer?
J’ai toujours dit que je ne voulais qu’un enfant, mais la naissance de ma deuxième fille m’a fait complètement changer d’avis sur ce sujet. Une troisième grossesse est même venue naturellement à 41 ans, mais elle s’est soldée par une fausse couche assez rapidement. J’ai difficilement fait le deuil de ce troisième bébé, mais à 44 ans je n’y songe plus du tout. J’ai passé l’âge des inséminations aujourd’hui, mais si j’avais deux ans de moins, oui, je pense que je le referais.

Quels conseils donneriez-vous à une maman dans cette situation?
Au vu de mon parcours atypique, je ne peux que conseiller de ne jamais baisser les bras ni douter de soi. Je dirais qu’il faut faire preuve de patience, prendre du temps pour soi, en parler pour évacuer et toujours y croire malgré les avis parfois négatifs du corps médical.

 

Margaux, 34 ans: « La nature s’est excusée de son retard »
Au bout d’une année de tentatives pour avoir un bébé, mon gynéco a parlé de PMA. Je vis au Brésil et ici les choses vont plus vite qu’en France. Nous aurions pu continuer les tentatives « naturelles » plus longtemps mais j’étais à bout moralement. Mon mari et moi avions une approche différente face à la FIV: je faisais abstraction du côté « bébé éprouvette », alors que lui avait l’impression que nous jouions aux savants fous. Mais face à ma fatigue morale, il est devenu le moteur de notre couple pendant cette épreuve. Il y a d’abord eu la préparation qui consiste à faire trois piqûres de stimulation hormonale par jour, que nous avons appris à faire nous-même à la maison. Ce n’est clairement pas une partie de plaisir. On en a fait un rituel: même si je les faisais moi-même, mon mari était à côté de moi. Puis il y a eu la ponction des ovocytes. On attendait chaque jour des nouvelles de nos petits embryons: 13 puis 9 puis 5… Comme disait mon mari : « C’est Hunger Games au labo! » Le jour de l’implantation fut un moment extrêmement sensible pour nous. Encore aujourd’hui les larmes me viennent en y repensant. C’est le moment où nous, couple infertile, devenions un couple « normal », où la science passe le relais à la nature puisque les embryons (nous avons choisi d’en mettre deux) s’accrochent ou non. Cette opération s’est passée sans anesthésie et sans mon mari qui attendait dans une autre salle. Mon médecin a baissé la lumière et tout le monde s’est concentré. J’ai senti la délicatesse que demandait cette opération et son importance. Je me suis mise à pleurer et tout le monde a fait une pause (il ne faut pas bouger d’un centimètre). Mon médecin m’a fait parler de la France, je me suis calmée et il a déposé mes deux embryons dans mon utérus. Pendant une semaine nous avons vécu entre espoir et désespoir, j’osais à peine bouger mais j’allais au travail quand même. Parfois je me cachais pour pleurer. L’angoisse de l’échec… Au bout d’une semaine j’ai fait une prise de sang le matin avant d’aller travailler. On s’était promis de regarder le résultat ensemble le soir à la maison mais mon mari a craqué et j’ai compris que j’étais enceinte en entendant son fou rire au téléphone. C’est étrange comme on prend l’habitude de l’échec et de la déception. Il m’a fallu du temps, beaucoup de temps pour intégrer complètement l’idée que cette fois, j’étais enceinte.

Si vous deviez recommencer?
Je ne pense pas qu’on réitérera l’expérience. Aujourd’hui j’ai mes jumeaux, Paul et Lou. Une amie m’a dit qu’en me donnant deux enfants, un garçon et une fille, la nature s’était excusée de son retard. J’aime bien cette idée que la nature a joué son rôle, même pendant ma FIV, alors on va apprendre à avoir confiance en elle et si je dois en avoir un troisième ce sera 100% grâce à elle cette fois-ci.

Quels conseils donneriez-vous à une maman dans cette situation?
Je lui dirais: « Ce n’est pas de ta faute ! » Avant de démarrer une PMA, on doit passer un tas d’examens pour comprendre d’où vient le problème, autrement dit : la femme ou l’homme? L’homme a un seul examen à passer là où la femme peut en subir une dizaine, et ensuite c’est elle qui recevra les piqûres. Tout est fait pour donner l’impression qu’il y a un « fautif ». Alors qu’en vérité, il s’agit de malchance et d’un challenge pour le couple. En fait, j’aimerais surtout donner un conseil aux proches d’une maman qui doit passer par là. Bannissez ces phrases de votre vocabulaire :
– Tu as tout le temps pour tomber enceinte.
– C’est surtout psychologique.
– Ça arrivera quand tu n’y penseras plus.
Écoutez, tendez un mouchoir ou un verre de vin, et c’est tout.

Tiphaine Lévy-Frébault
Crédit photo : ©Belly Balloon Photography / Les Louves

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