“Si les pères ne savent pas comment s’occuper de leur enfant, ils doivent s’occuper de leur conjointe”

Sommés de s’impliquer davantage dans la parentalité, les futurs et jeunes pères ont pourtant parfois le sentiment d’être mis de côté pendant la grossesse. Et d’être un peu perdus après la naissance. Depuis 2014, Gilles Vaquier de Labaume œuvre pour les aider à trouver leur place auprès de leur enfant (et, au passage, soulager les jeunes mères). Féministe sans le savoir, le fondateur de L’Atelier du futur papa et auteur, avec le Dr Michel Canameras, de La Grossesse côté papa, nous livre quelques pistes pour aider les futurs pères à s’épanouir pleinement.

Racontez-nous la genèse de l’Atelier du futur papa

J’étais formateur en pharmacie lorsqu’en 2014, ma fille de 9 mois est tombée dans l’escalier. Une chute heureusement sans conséquences mais qui m’a violenté. Comme beaucoup de personnes qui subissent un traumatisme, j’ai ressenti le besoin de réagir et de partager cette expérience pour éviter qu’elle se reproduise. J’ai donc décidé de lancer un atelier sur la santé et la sécurité des bébés à destination des hommes. J’ai passé un CAP petite enfance, je me suis entouré de professionnels. Rapidement, j’ai pu écrire mon premier livre avec Isabelle Filliozat, Le Nouveau papa, les clés de l’éducation positive. Et puis j’ai commencé à travailler avec la CAF, des mairies et des maternités. Mon objectif : assister ces futurs papas qui ont ce désir fort de s’impliquer mais ne savent pas par où commencer. Je les réunis pour leur donner des informations concrètes qui leur permettront de s’investir rapidement et efficacement auprès de leur conjointe et de leur bébé.

Avez-vous le sentiment que depuis le début de votre activité en 2014 les mentalités ont évolué ?

Absolument. Ce besoin est grandissant des deux côtés. Les jeunes mamans n’ont plus envie d’assumer toute cette charge mentale et physique seule. Et les jeunes pères veulent prendre leur part également. Ceux que je vois dans mes ateliers, en tout cas, ont envie d’embrasser toutes les difficultés qu’implique le fait d’avoir un enfant. Ils veulent être des équipiers efficaces mais n’ont pas les clés. Certains viennent parce qu’on leur a offert un « bon cadeau » et ne cachent pas qu’ils sont venus à reculons… Mais ils repartent en me disant : « vos ateliers devraient être obligatoires ! ».

Quelles sont les principales angoisses auxquelles les pères que vous rencontrez sont confrontés ?

La paternité est une nébuleuse pour les hommes. D’autant que, contrairement aux femmes, ils n’échangent pas facilement sur ce qui les travaille et se retrouvent donc seuls face à leurs angoisses. Au cours de mes ateliers, ils en expriment principalement deux : la première est liée au couple, à son devenir et notamment à la question intime de la sexualité. La seconde est liée à la manipulation (au sens du geste) du nourrisson. Pour les rassurer, j’essaie de leur apporter des réponses concrètes avec des statistiques parlantes (1 couple sur 4 se sépare la première année, plus de 20% des femmes font une dépression post-partum), et je les amène à échanger entre eux. Notamment avec l’espoir qu’ils intègrent l’idée que leur implication dans la parentalité dès la période post-natale est fondamentale pour la dynamique du couple. Et pour la création du lien avec leur enfant.

Concrètement, quels sont les principaux messages que vous faites passer à ces futurs pères ?

D’abord, je leur fais comprendre que la période post-natale, c’est fatigant, qu’ils ne vont pas pouvoir se mettre les pieds sous la table. Ensuite, je leur explique que s’ils ne savent pas comment s’occuper de leur enfant, ils doivent s’occuper de sa maman, de leur conjointe. Et puis, l’idée fondamentale que je souhaite leur faire passer tout au long de ces ateliers qui s’étalent sur une journée, c’est qu’ils doivent s’inscrire dans la relation émotionnelle à leur enfant. Globalement, on leur a plutôt appris que l’homme doit s’occuper des finances et de l’autorité. Ils faut donc leur apprendre que c’est l’accompagnement émotionnel des enfants qui prime dans la période 1-6 ans. Et que c’est en acceptant de proposer un réconfort émotionnel, qui a longtemps été considéré comme une faiblesse, qu’ils vont construire un hyperlien avec leur enfant.

Merci à Gilles Vaquier de Labaume, fondateur de L’atelier du futur papa et auteur, avec le Dr Michel Canameras, de La Grossesse côté papa, aux éditions Leduc.

Crédit photo : Kelly Sikkema / Unsplash